Gaston Déry, C.M. Président Société de protection et d’aménagement de l’île aux Pommes

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Le Saint-Laurent, cette « Route qui marche », relie les Grands Lacs et l’océan Atlantique, de la source à la mer. Il accompagne les activités économiques et socioculturelles des communautés côtières depuis des millénaires. Les Amérindiens l’appelaient Magtogoek et les gens du Bas du fleuve, la mer.  Quelle que soit son appellation, tous s’accordent pour le qualifier de majestueux. Le Saint-Laurent est une gigantesque porte d’entrée sur l’Amérique. Formidable outil de développement pour le Québec, il est la voie qui nous ouvre au monde et notre fleuve a été reconnu Patrimoine national dans une motion adoptée à l’unanimité par l’Assemblée nationale du Québec le 23 mars 2010.

Mais le Saint-Laurent procure à l’occasion et généreusement de belles histoires, des moments privilégiés, des moments de grâce ancrés à jamais dans notre cœur. Voici une de ces histoires

Les oiseaux ne se cachent pas toujours pour mourir...

Un des signes annonciateurs du retour des beaux jours demeure sans contredits l’arrivée de la Grandes Oie des neiges , avec son whouk ou kowk ou kow-luk aigu et nasal qui ressemble à un aboiement de chien et que l’Oie répète à tout moment dans le ciel lors de sa migration. Plusieurs espèces d’oiseaux nous reviennent afin de profiter de la riche biodiversité du Saint-Laurent pour se reproduire.  Le canard eider est de ceux-là. Il revient chaque année pour propager la vie, notamment sur l’île aux Pommes dans l’estuaire maritime du St-Laurent. Près de 10,000 eiders s’y donnent rendez-vous alors que plus de 3000 femelles y nichent …Mais saviez-vous que les eiders reviennent nicher et souvent mourir là où ils sont nés. On nomme ce phénomène la « philopatrie » , du mot grec « philos », se traduisant par « aimer » et du nom latin « patria », « pays du père ».

Je me souviens que lors d'un premier séjour printanier à l'île aux Pommes alors que j’avais aperçu en fin d'après-midi, un eider se reposant calmement à quelques pas du chalet. Je me suis approché respectueusement pour constater que ce vieux mâle semblait vivre paisiblement ses dernières heures, sans souffrance.

À ma grande surprise, il s'est laissé prendre dans mes bras, comme un ami. Il a collé calmement sa tête contre moi et nos regards se sont échangés de beaux sentiments de sérénité et d'amitié pendant de très longues et belles minutes. J'ai l'impression de lui avoir donné du bonheur, du réconfort, de l'amour... Puis, je suis allé le déposer délicatement sous un buisson ayant une vue imprenable sur son St-Laurent.

Le lendemain matin, j'ai retrouvé mon vieil ami sans vie, la tête tournée vers le fleuve...

Il avait parcouru des milliers de kilomètres pour migrer vers l'île qui l'a vu naître...pour mourir chez lui dans la paix et la sérénité.

Une belle leçon alors que nous vivons des situations troublantes avec nos aînés confinés, seuls...Les oiseaux ne se cachent pas toujours pour mourir...

Gaston Déry, C.M.

Président

Société de protection et d’aménagement de l’île aux Pommes